PBI. Une nouvelle façon de protéger les plantes
L'usage des plantes de services entre dans une stratégie de protection « durable » des cultures, qui oblige à modifier sa manière de travailler et de raisonner.
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À l'occasion d'une conférence organisée sur le Salon du végétal, Alain Ferre, de l'Astredhor Loire-Bretagne (site d'Angers), a pris à contre-pied le sujet des plantes de services pour l'aborder sous l'angle... socio-économique. Ces plantes, disposées autour ou au sein d'une culture, apportent un avantage à la production : elles servent de réservoirs de nourriture pour les auxiliaires généralistes, ou de pièges à ravageurs – comme le Bergenia pour l'otiorhynque ou l'aubergine pour l'aleurode – ; ou, fleuries, elles attirent les auxiliaires adultes floricoles. Mais ces plantes, non commercialisées, nécessitent un suivi régulier : une perte d'argent et de temps, diraient certains.
Changement de calcul
Côté économique, Alain Ferre souligne que de nombreuses charges « grises », souvent fixes, augmentent le coût d'une application chimique, ce qui permet de relativiser celui des plantes de services : prix des EPI (Équipements de protection individuelle), amortissement et entretien du matériel, temps d'étalonnage, coût du contrôle obligatoire des pulvérisateurs, gestion des effluents... Ainsi, pour 2013, la station Arexhor Pays de la Loire a calculé un coût fixe de 44 euros par produit phytosanitaire appliqué. Pour atteindre ce coût avec une densité de 4,7 plantes de services sur 100 m², cela équivaut à acheter chaque plante 10 euros. Le coût de la main-d'oeuvre et des intrants varie quant à lui de 0,028 €/m² pour une protection associant plante piège et effeuillage à 0,085 €/m² pour une protection associant plante piège et auxiliaires, avec un coût intermédiaire pour l'association plante piège et application chimique. « Quand on fait le bilan d'une pratique, il faut inclure la main-d'oeuvre et les charges indirectes. »
Sociologique ?
« Les plantes de services sont des méthodes de protection performantes, mais après un certain temps, les producteurs arrêtent de les utiliser parce qu'il ne se passe rien », constate Alain Ferre, qui enchaîne sur une devise de Shadok : « Il vaut mieux pomper même s'il ne se passe rien que risquer qu'il se passe quelque chose de pire en ne pompant pas ! » Cette devise amène le directeur technique de la station à aborder les plantes de services sous l'angle sociologique, et à se risquer à une comparaison : l'esprit masculin, « à la Rambo », de l'application phytosanitaire (de synthèse ou de biocontrôle) qui offre le sentiment d'action et la satisfaction du résultat, opposé à l'esprit féminin de l'usage des plantes de services, impliquant de savoir prévenir et surveiller. Dans le premier cas, « on attend le problème puis on agit » ; dans le second, « on agit sur les causes pour supprimer le problème », avec l'inconvénient d'avoir l'impression de faire les choses pour rien... et l'irrésistible tentation de tout arrêter. Auquel cas, les problèmes finissent inévitablement par (re)surgir. Que faire ? « Expliquer aux salariés les nouvelles méthodes de protection, pour éviter tout dénigrement des “observateurs”, conseille Alain Ferre. Considérer les plantes de services comme une intervention culturale et les insérer dans le planning de culture. »
Valérie Vidril
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